Le legs d’Alfred Pellan à Granby
Alfred Pellan compte parmi les artistes canadiens les plus connus. Aussi Granby peut-elle s’enorgueillir de posséder deux de ses murales, installées sur la façade du 142, rue Dufferin et celle du Cégep de Granby-Haute-Yamaska.
Marie-Christine Bonneau
Publié le 26 février 2020 | Mis à jour le 12 juin 2024
Publié dans : Culture, Patrimoine
Un avenir incertain
Dans le cadre de la reconstruction de l’édifice de la MRC de la Haute-Yamaska, rue Dufferin, un article publié dans La Voix de l’Est du 20 février 2020 nous apprenait que la murale St. Patrick d’Alfred Pellan, installée sur la devanture du bâtiment actuel, allait être démantelée et remisée, et ce, contrairement aux plans d’origine qui prévoyaient sa réintégration dans l’immeuble à construire.
Afin d’informer ses lecteurs sur la portée de ce geste, la Société d’histoire de la Haute-Yamaska procède ici à la republication d’un article de Marie-Christine Bonneau sur les œuvres granbyennes d’Alfred Pellan. Paru initialement dans l’Historien régional au printemps 2003, le lecteur y trouvera matière à alimenter ses réflexions sur l’avenir de la murale St. Patrick.1
26 Février 2020
Pellan à Granby
Alfred Pellan compte parmi les artistes canadiens les plus connus. Aussi Granby peut-elle s’enorgueillir de posséder deux de ses murales, installées sur la façade du 142, rue Dufferin et celle du Cégep de Granby-Haute-Yamaska.
Né en 1906 à Québec et décédé à Montréal en 1988, Alfred Pellan est une figure marquante de l’art canadien moderne et l’un des grands initiateurs de l’art abstrait au Québec. De 1926 à la Deuxième Guerre mondiale, il s’installe à Paris où il devient vite l’enfant chéri de la critique. En 1939, sa notoriété française lui permet de participer à l’exposition Paris Painters Today, au Musée d’art moderne de Washington, en compagnie des grands maîtres de l’École de Paris, les Dali, Matisse et Picasso. De retour au Québec, il enseigne à l’École des Beaux-arts de Montréal de 1943 à 1952. Là, sa volonté de rendre l’art vivant le place fréquemment en conflit avec la tradition conservatrice de la vénérable institution. En 1948, Pellan crée aussi des remous dans la petite colonie artistique montréalaise en publiant Prisme d’Yeux, un manifeste qui exalte la liberté créatrice de l’artiste en opposition à la rigidité idéologique exprimée dans Refus Global de Paul-Émile Borduas et des automatistes. Au moment où Alfred Pellan exécute les murales de Granby, en 1958 et 1960, il est un artiste célèbre dont les œuvres ont déjà fait l’objet de plusieurs rétrospectives autant au Canada qu’en France.
La murale St Patrick
Construite en 1958 pour desservir la population catholique irlandaise de Granby, l’école St Patrick (142, rue Dufferin) fut nommée d’après un saint du Ve siècle à qui les Irlandais vouent une grande dévotion. Mesurant 2,3 mètres par 3,6 mètres de hauteur, la mosaïque de saint Patrick s’inspire des enluminures irlandaises du haut Moyen Âge, que l’on peut apprécier dans le Livre de Kells, un précieux ouvrage réalisé au VIIIe siècle. Comme les artistes irlandais de l’époque, Pellan délimite les formes du visage par des traits noirs s’apparentant davantage au dessin qu’à la peinture. L’influence moyenâgeuse se remarque aussi par l’utilisation de couleurs vives, par la posture du sujet ainsi que par la forme en plein cintre qui entoure ce dernier. Dessinée par Alfred Pellan, l’œuvre fut réalisée par Claude Théberge, un ami personnel du maître.
La murale Immaculée-Conception
L’édifice qui abrite aujourd’hui le Cégep de Granby-Haute-Yamaska fut construit en 1960 pour y loger l’école secondaire pour filles Immaculée Conception, dirigée par les sœurs du même nom. Intégrée au nouveau bâtiment, la murale Immaculée-Conception fut dessinée par Alfred Pellan et réalisée par les ateliers Jacques Garnier. La « Reine des Cieux » y est représentée accompagnée des signes qui la symbolisent : l’azur, les étoiles, le blanc virginal. L’exécution de cette mosaïque de céramique d’un type nouveau, dont les dimensions atteignent 2 mètres de largeur par 3,4 mètres de hauteur, s’est révélée problématique en raison des pièces en ronde bosse (en relief) de dimensions et de poids considérables qu’elle requérait. Détérioré par l’action du gel et du dégel, l’ouvrage fut restauré en partie vers 1980.
- Marie-Christine Bonneau, « Pellan à Granby », Historien régional, vol. 3, no. 2 (printemps 2003), p. 1. ↩︎